J'aurais pu me précipiter tout de suite sur mon étui pour m'emparer du couteau suisse, mais je me suis retenue. C'était une sorte de jeu avec moi-même, pour voir combien de temps j'allais résister. Je tirais une certaine satisfaction de savoir que le couteau était là, bien couché dans le fond de mon étui. Je me suis étendue sur mon lit et je me suis retournée, dos à mon bureau, mais face au mur.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, quand l’Allemagne occupait ce qui était à l’époque la Tchécoslovaquie, Terezin a servi de camp de concentration. Pour survivre à Terezin au cours de cette période sinistre, il fallait trouver un moyen, n’importe lequel, pour ne pas en être expulsé, puis il fallait tenir bon, malgré le bouillon clair distribué aux prisonniers midi et soir, malgré les punaises de lit et les poux, malgré les longues heures passées à faire des tâches fastidieuses, éreintantes, inhumaines.